Le 20 novembre 2017, mon père, mon oncle Philippe Comeliau et moi-même, chargeons mon vélo, ma remorque et mes sacoches à l’arrière d’une camionnette de location. Mon père et Philippe sont venus à Marseille pour me saluer une dernière fois avant que je ne quitte le continent européen. Nous sommes attendus à 9 heures du matin à l’entrée d’Eurofos, un terminal pour bateau cargo à Fos-sur-Mer, à environ 70 km de Marseille. C’est là que je suis censé embarquer sur le Gisele A.
Le restaurant de l’hôtel où nous avons logé est vide lorsque nous partons. Les plateaux de petits-déjeuners préparés par l’équipe du matin sont disposés sur le bar, en attente d’être servis aux clients encore endormis. Le ciel est bleu et le vent, persistant depuis près d’une semaine, a sensiblement faibli durant la nuit.
Nous arrivons plus tôt que prévu sur le parking où nous avons rendez-vous, et nous demandons comment les choses vont se passer à partir de maintenant. L’embarquement sur le navire, la traversée de la Méditerranée, la traversée du désert et de l’Afrique…
Quelques minutes plus tard, Andre Zakari, Gilbert Braun d’ARKAS et Benjamin Picanias, m’escortent depuis la barrière d’entrée jusqu’au quai où est amarré le Gisele A. Je suis accueilli au pied de la passerelle par Mete Koçar, le capitaine, et Emre Sahinturk, le premier officier du navire. Je reçois un bouquet de fleurs et une photo est prise avant que mon vélo, la remorque et mes bagages ne soient pris en charge par des matelots.
Une fois à bord, après avoir reçu un thé turc de bienvenue et avoir été présenté à l’équipage, on m’indique ma cabine. Il s’agit d’une suite, située au 8ème étage, 5 niveaux au dessus du pont et 3 niveaux sous la passerelle. Je suis invité par le capitaine Koçar à assister au manœuvres de départ.
Chacun joue un rôle précis durant cette procédure. Le pilote, qui est détaché par le port, monte à bord du navire pour indiquer la meilleure route à suivre en fonction des courants sous-marins, du vent, des fonds marins changeants, du tonnage, de la puissance du moteur, et des dimensions du navire. Il fournit des indications au capitaine et au premier officier, mais il ne donne pas d’ordres. Durant la première partie de la manœuvre, le pilote officier prends position sur la passerelle latérale, côté quai, aux côtés du premier officier.
Le premier officier contrôle les moteurs et les propulseurs depuis la passerelle latérale. Il donne les ordres en fonctions des informations qu’il reçoit du pilote, du capitaine et des autres officiers qui se sont disposés en poupe, en proue et en d’autres positions stratégiques sur le navire. Il communique avec les autres officiers ainsi qu’avec la salle des machines, par talkie walkie. Il donne également des instructions aux bateaux pousseurs-remorqueurs.
Le capitaine garde un œil sur les instruments de navigation qui indiquent l’orientation du navire, sa vitesse, la vitesse et la direction du courant sous-marin, la force du vent, et cetera, et notifie l’officier principal de l’évolution de tous ces paramètres dont il faut tenir compte. À tout moment durant la manœuvre, le capitaine peut passer outre un ordre donné par l’officier et prendre le contrôle du navire dans la mesure où il est seul responsable du navire, de sa cargaison et de son équipage.
À la barre, un matelot breveté suit les ordres donnés par l’officier Sahinturk, relayés par le capitaine. Habituellement, le matelot ne monte sur la passerelle que pendant les manœuvres, ou en situation critique, afin de libérer le capitaine et les officiers d’une de leurs tâches habituelles.
Tout cela crée un étrange ballet. Le pilote, par exemple, pourrait suggérer un tribord 10, signifiant que le navire devrait changer de cap de 0,10° à tribord. Si l’officier principal approuve, il criera « Tribord10 ! » au capitaine qui répètera « Tribord 10 ! » pour confirmer qu’il a bien reçu l’instruction, ainsi que pour la transmettre au matelot breveté. Au tour du matelot breveté de crier « Tribord 10 ! » une première fois afin de confirmer qu’il a bien reçu l’ordre, puis une nouvelle fois, lorsque le navire aura acquis le cap demandé. Cette information est alors communiquée au pilote dans le sens inverse.
Mesurant 230 mètres de long, 67 mètres de haut, 32 mètres de large et pesant 65.000 tonnes, c’est, au début, très lentement que le Gisele A s’écarte du quai. Centimètre par centimètre. Il faut, au total, plus d’une demi-heure pour quitter le port. Une fois fait, le cap est mis sur la Sicile.
Le déjeuner est alors servi dans la salle à manger. Je suis installé entre le capitaine Koçar et l’officier principal Sahinturk, à la même table que l’ingénieur et l’électricien principal.
L’atmosphère est détendue, après avoir été très professionnelle et concentrée pendant toute la durée de la manœuvre. Cette ambiance positive se confirmera jour après jour, jusqu’à notre arrivée à Alexandrie huit jours plus tard, après une escale en Grèce.
Je souhaite remercier chaleureusement Philippe Meert, Tomas Steppe, Xavier Lassalle, Hélène Lambert ainsi que toutes les personnes impliquées au sein de REUSE nv, TRANSCAUSSE et ARKAS HOLDING qui ont rendu possible cette traversée de la Méditerranée !
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